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Hors-série 15 – Faire une thèse au XXIe siècle (Rendez-vous de l’Histoire de Blois 2021)

Quel est le quotidien d’un‧e jeune chercheur‧se en thèse d’histoire médiévale aujourd’hui ?

En octobre 2021 cette table ronde a été enregistrée en public aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois édition 2021 avec d’ancien.ne.s invité.es du podcast pour parler de comment faire une thèse au XXIème siècle, entre innovations et problématiques nouvelles.

Un rituel de l’université

Table ronde Passion Médiévistes aux Rendez-vous de l'Histoire de Blois 2021
Table ronde Passion Médiévistes aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois 2021

La thèse est un exercice qui fait depuis plusieurs siècles partie intégrante d’une carrière dans le milieu académique. À la fois rite de passage, formation au travail de recherche et acte de reconnaissance par les pair‧e‧s, la thèse conclu la phase d’apprentissage et transforme définitivement l’étudiant‧e en chercheur‧se. Mais elle revêt aujourd’hui des réalités bien éloignées des thèses précédentes.

La technologie avance à toute vitesse, offrant opportunités et difficultés. Les universités souffrent d’un sous-financement croissant, et les postes se font de plus en plus rares. L’institution en elle-même évolue, tentant de répondre aux dérives qui la sclérosait depuis longtemps et pouvait rendre le travail de doctorat encore plus complexe qu’il ne l’est déjà.

Cette table ronde enregistrée en public aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois édition 2021 entend donner un aperçu de ce qu’est le travail de thèse aujourd’hui à travers le regard de trois jeunes médiévistes. Fanny Cohen Moreau a rassemblé autour de sa table trois ancien‧ne‧s invité‧e‧s de l’émission, qui préparent ou ont soutenu leurs thèses :

  • Mecthilde Airiau, doctorante au sein du centre Chastel – Sorbonne-Université, sous la direction de Philippe Lorentz, elle prépare une thèse sur Les mots et usages de la couleur chez les peintres du Trecento florentin, et est chargée d’études et de recherche à l’Institut National d’Histoire de l’art au sein du domaine « Histoire et théorie de l’histoire de l’art et du patrimoine » puis ”Histoire de l’art du IVe au XVe siècle” depuis octobre 2018.
  • Marie Lise Fieyre, docteure en Histoire du Moyen Âge :  Bâtards de princes. Identité, parenté et pouvoir des enfants naturels chez les Bourbon (XIVe-milieu du XVIe siècle), 2017. Chercheuse associée à l’Université de Paris laboratoire ICT (Identité Culture Territoire). Professeure d’Histoire-Géographie (académie de Clermont-Ferrand).
  • Vincent Lethumier, doctorant en histoire médiévale à l’Université Paris I, s’intéresse à l’histoire politique du bas Moyen Age. Sa thèse porte sur l’institution de la pairie de France entre le XIIe et le XVe siècle depuis fin 2019.

Au fil des questions, ces jeunes médiévistes exposent leurs ambitions, leurs découvertes et leurs difficulté tout au long de la thèse.

« Je me représentait un peu le doctorant comme un petit rat de bibliothèque ou un petit rat d’archives qui ne rechigne jamais à la tâche » – Vincent Lethumier

Avant même la thèse, la plupart des étudiant‧e‧s a une image de ce qu’est un‧e doctorant‧e. Les invités nous partagent leurs appréhensions, leurs méthodes de travail mais aussi les moments qui les ont surpris‧es tout au long de leur travail. Les relations aux organes de direction de recherche, la définition du sujet et la confrontation à la documentation sont des points importants et quasi-quotidiens pour ces jeunes chercheur‧se‧s.

« Non, la numérisation sur Gallica, aussi haute définition soit-elle, ne remplacera jamais le contact direct avec le manuscrit d’origine » – Mecthilde Airiau

Table ronde Passion Médiévistes aux Rendez-vous de l'Histoire de Blois 2021
Table ronde Passion Médiévistes aux Rendez-vous de l’Histoire de Blois 2021

Les nouvelles technologies sont maintenant au cœur de l’exercice de la recherche, et donc en toute logique de celui de la thèse. Aujourd’hui un grand nombre d’outils informatiques s’offrent aux chercheur‧se‧s. Les bases de données, ces puissants registres d’informations interactifs, sont des incontournables de la recherche, malgré les contraintes de création et remplissage. Les documents étudiés sont aussi de plus en plus numérisés, facilitant les consultations, mais n’évitant pas d’aller les voir in vivo. Sont aussi numérisés de nombreuses revues et de nombreux ouvrages, que l’on peut découvrir sur des sites spécialisés, souvent gratuitement, comme CAIRN ou Persée. Enfin, les réseaux sociaux tiennent une part croissante dans l’exercice de la recherche en ouvrant les perspectives et en s’ouvrant aux autres.

« Dans un colloque le moment le plus important, c’est la pause café » – Marie-Lise Fieyre

En effet, la recherche se fait aussi à travers les rencontres et l’échange. Les réseaux sociaux permettent certes cet échange, mais les rencontres se font tout au long de la carrière. Nos jeunes chercheurs expliquent comment les discussions et les travaux de diffusions auxquels iels assistent ou participent leur permettent de faire avancer leurs recherches. L’aspect humain de la thèse est très important. Devant ce constat, l’Université change et développe de nouveaux outils afin d’accompagner plus solidement les doctorant‧e‧s.

« [le doctorat] passe dans le domaine du loisir aux yeux de la société » – Marie-Lise Fieyre

Malheureusement, aujourd’hui, faire une thèse est aussi de plus en plus difficile. Entre une pénurie de places aux écoles doctorales, une forte baisse des budgets à l’éducation supérieure et les fermetures de postes, faire une thèse en 2021 est compliqué. La douloureuse période du COVID-19 n’a certainement pas aidé. Ainsi, le monde de la thèse subit aussi de fortes mutations, avec des logiques de concours en amont, de peur en aval et d’incertitude financière chronique. Le manque de financement, les emplois à côté inadaptés au statut de chercheur‧se‧s, ou encore les pressions exercées sur les doctorant‧e‧s sont d’autant plus lourds à porter que le statut même est peu considéré.

Si cet épisode vous a intéressé vous pouvez aussi écouter :

Pour revivre cet épisode vous pouvez aussi lire ce live tweet fait par Clément (cliquez sur le tweet) :

Merci à Ilan pour la rédaction de cet article !